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Hommage à Robert Marcus

Hommage à Robert Marcus

par Micheline Gutmann

Mon père, ce héros…au caractère si sérieux et à l'humour acéré, a laissé sur terre bien peu de choses à ses propres yeux mais beaucoup dans l'esprit de ses enfants.
Ce qui ne peut être décrit par des faits ni par des photos, en plus de son intelligence, sont sa grande culture scientifique, historique, géographique, littéraire, musicale…On ne peut que lui reprocher d'avoir presque tout gardé pour lui et de ne pas en avoir suffisamment fait profiter les autres. D'une grande honnêteté, d'une parfaite intégrité, il se sentait plus à l'aise avec des gens simples que dans les réunions mondaines.

Né en décembre 1907, Robert, fils aîné de Joseph et d'Adèle Marcus, rapportera tout de suite d'excellents bulletins scolaires. Lorsqu'il eut dix ans, son institutrice convoqua ses parents afin de les inciter à l'inscrire en 6e en leur disant que leur fils était exceptionnellement doué et devrait faire des études supérieures. Fiers mais embarrassés par les conséquences financières que cela pouvait entraîner, mes grands-parents soutinrent cependant leur fils.
Robert travaillera afin de payer ses études et ne pas être à la charge de ses parents.

En 1929, il intégrera l'Ecole centrale des Arts et Manufactures et en sortira en 1931…en pleine crise économique. Passionné de radio, qui en était à ses débuts, il inventera un procédé technique permettant d'éliminer les parasites à la réception. Mais la crise est telle qu'il n'arrive pas à se faire une situation dans le domaine qui l'attire. Il se marie en 1935 avec une cousine issue de germain. En attendant que l'environnement économique s'améliore, il aide son épouse qui a hérité d'un commerce de fourrures trop lourd à gérer pour elle.

 
 

Fiançailles Robert et Georgette, printemps 1935

Robert hiver 1935 sur la route Napoléon, bien sûr !

 

 
En 1936, naissent les jumelles Arlette et Micheline. Pour quelqu'un qui n'avait jamais eu de train électrique et qui attendait un fils pour s'en offrir, la déception est grande ! Mais les petites sont si mignonnes qu'il se fait assez vite une raison. Ce sera pour la prochaine fois ! (en avril 1940, naquit une troisième fille !)
 

Les jumelles avec leurs parents

 

Quelques années tranquilles, d'après les photos on pourrait dire de bonheur, vont s'écouler. Mais un fou furieux arrive qui va mettre le monde à feu et à sang.
Pendant ses études, Robert a fait l'école des E.O.R (Elèves officiers de réserve), à Fontainebleau et en partie à Coetquidan (camp actuellement réservé aux Saint-Cyriens) et en sort lieutenant de réserve d'artillerie (J.O. du 4.9.1931). Il a accompli plusieurs périodes au 109e R.A.L.
Médaille 109e RAL

Il va donc être rappelé immédiatement lors de la mobilisation générale le 1.9.1939.

 
 
 

 

Robert avec l'écharpe hiver 1939
 

Mon père savait ce qu'une défaite pouvait apporter de malheur à la France en général et aux Juifs en particulier. Sa motivation a été forte et explique l'acharnement avec lequel il se bat…malheureusement mal encadré, mal suivi. Pas d'équipement suffisant, chefs lamentables.

 
 

Citation à l'ordre de l'armée

Croix de guerre avec palme

Son témoignage sur cette période, donné avec une totale objectivité, a un grand intérêt historique. Nous vous invitons à le lire dans le chapitre suivant.

Les armées françaises sont encerclées, Robert Marcus a combattu jusqu'à la dernière minute mais il doit se rendre dans le petit bois de Chaouilley au sud de Nancy.
Il espérait être alors démobilisé, mais il sera fait prisonnier et le restera pendant cinq ans successivement aux camps de Colditz, Munster et Lübeck, à l'Oflag X C.

 
 

Forteresse de Colditz

Oflag XC, Robert Marcus au milieu
Robert à Lübeck avec Jacques Lang (imprimeur)

 

Pendant ce temps, son épouse, les jumelles et le nouveau-né ont fui Paris sur les routes encombrées, avec le minimum nécessaire, laissant l'appartement parisien qui a été par la suite complètement vidé et occupé par des collabos. De même pour le magasin de fourrures.
Ma mère avait une sœur dévouée encore célibataire qui l'a aidée et soutenue, un frère qui lui a donné du travail jusqu'à l'occupation de la zone libre.
Leur " guerre " fera peut-être l'objet d'un autre chapitre.

Le camp de Lübeck a failli être passé au lance-flammes avec tous ses prisonniers si l'ordre de Hitler avait été suivi. Heureusement, les allemands sentant arriver leurs ennemis et ayant peur pour eux de leur réaction, n'ont pas osé exécuter l'ordre.
Robert Marcus a été libéré le 8 mai 1945 par des troupes écossaises. Il a réquisitionné une voiture, a fait le service d'ambulance pendant quelques jours puis, avec 3 camarades, ils sont arrivés à Paris le 13 mai.
Sur le plan militaire : promu Capitaine de réserve (J.O. du 7.9.1949), il demande le 30.08.1955 à rester dans les cadres. Il est admis à l'honorariat de son grade le 20.12.1964.
Chevalier de la Légion d'Honneur, décret du 298.12.1959.
(Etat signalétique et des services).

Dans ses camps de prisonniers, Robert a suivi des cours de bridge et enseigné les maths, de la physique en particulier l'électricité. Mais comment se tenir au courant de la science qui a avancé à grands pas pendant ce temps ? A son retour, il n'a plus eu qu'à retrouver le commerce qui ne lui plaisait pas mais lui permettait de gagner sa vie et celle de sa famille.

 
 
 

Robert Marcus en 1946

 

Nous passerons sur les problèmes de santé, ceux de sa femme puis les siens, qui ont gâché leur vie à partir de 1950. Ils sont décédés à quelques mois d'intervalle en 1977 et 1978.

Cependant, un évènement heureux : Micheline se marie en 1961.

 
 
 

Photo mariage