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L'association de la généalogie juive
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Par Micheline Gutmann
Henk (Hendrick Lodewijk ) ASSER, a constitué la plus grande partie de l’arbre que nous reproduisons dans GenAmi n° 7 de janvier 1999 (uniquement les premières générations). Pour une réunion familiale, il a composé un ouvrage sur ses ancêtres (voir notre bibliothèque). Une partie en a été extraite et traduite du néerlandais en français par Helga BECKER-LEISER et a fourni une importante contribution à la rédaction de cet article.
Rappelons brièvement que le Grand Sanhédrin (9 février-13 mars 1807) fut convoqué par Napoléon à Paris afin d’entériner de façon solennelle les décisions prises par l’Assemblée des Notables, réunie de juillet 1806 au 6 avril 1807.
En ce qui concerne le déroulement de ces assemblées, les délibérations et décisions prises, nous conseillons vivement à nos lecteurs de se reporter au livre : « Le Grand Sanhédrin de Napoléon », écrit par l’équipe « Nouvelle Gallia Judaica », publié en 1979 sous la direction de B. Blumenkranz et Albert Soboul, aux éditions Privat.
Le rôle que nous nous sommes donné est de rechercher les personnes présentes dans cette assemblée, de les identifier, d’étudier leurs origines, d’établir une rapide biographie et des renseignements généalogiques détaillés ascendants et descendants. Nous favoriserons les recherches non encore développées des membres, français ou étrangers, qui ont été peu connus en France.
Le Grand Sanhédrin comportait 45 rabbins et 26 membres laïcs sans compter les suppléants et les secrétaires. Trois Néerlandais et deux Allemands les rejoignirent le 12 février.
Dans le numéro 2 de GenAmi, nous avons cité Seligmann Lévy, rabbin de Durmenach, dont la généalogie a été publiée dans La famille Hauser de Durmenach..., généalogie qui, depuis, a pu être complétée. Nous avons également, à cette date, réalisé une étude sur Abraham de Cologna.
Il y avait alors aux Pays-Bas quatre communautés juives principales : la communauté portugaise d’Amsterdam, les communautés askhénases d’Amsterdam et de Rotterdam, et la nouvelle communauté libérale d’Amsterdam, Adat Yeshurun, fondée en 1797, cette dernière étant constamment prise à partie par les autres plus conservatrices.
L’annonce du Grand Sanhédrin fut accueillie de façons assez diverses, avec crainte pour les anciennes communautés dont les parnasim (chefs de la communauté), soutenus par la municipalité, s’opposaient à toutes les nouvelles idées ; avec joie pour la nouvelle communauté, qui désigna trois délégués : l’avocat Crael Asser, le médecin Hirtz (ou Hartog) Lemon et le mathématicien Juda Littwack.
De longues discussions s’ensuivirent qui furent tranchées par le roi Louis-Napoléon qui donna son accord à l’envoi de la délégation de l’Adat Yeshurun dont les idées s’accordaient avec les siennes. Au retour des délégués, les décisions du Grand Sanhédrin ne purent être appliquées, même après la réunion des communautés qui eut lieu le 17 décembre 1808.
Parmi les délégués Néerlandais se trouvait donc Carel ASSER, jeune avocat issu d’une famille ayant déjà une importante responsabilité dans la communauté juive des Pays-Bas et plusieurs membres de cette famille continueront à occuper une place prépondérante parmi les hauts fonctionnaires de l’état.
En 1807, la famille ASSER habite Amsterdam depuis plusieurs générations. Le grand-père de Carel, Salomon ASSER, était tailleur de diamants et courtier en café. Il épousa Gracia van Emden, fille aînée de Alexandre Hartog van Emden, physicien et médecin respecté.
Mozes Salomon ASSER (1754-1826), son fils, pourtant destiné au commerce, devint un spécialiste en droit. Bien que sans diplôme universitaire, il fut nommé procureur à Amsterdam, puis membre du comité de Justice. Il fut l’un des fondateurs de « Felix Libertate », ou Club des Patriotes, société créée pour favoriser l’émancipation des Juifs et leur faire obtenir la citoyenneté Batave. Sous Napoléon, il collabora à la création du code de commerce. En 1820, il fut décoré Chevalier de l’Ordre royal du Lion Néerlandais. Ce fut le patriarche et le véritable fondateur de cette dynastie.
En 1773, il épousa une jeune sœur de sa belle-mère, Cheila Tobie, originaire de Berlin. Ils eurent trois fils dont l’un mourut assez jeune.
Carel ASSER (1780-1836), après des études à l’Athanaeum, alors Université d’Amsterdam, soutint ses thèses de droit à Leyde en 1799. Avocat à Amsterdam, il épousa en 1801 Rosa Levin de Berlin, fille du marchand d’or Markus Levin, sœur de la célèbre Rachel Levin plus tard Varnhagen, écrivain et philosophe, « la femme la plus spirituelle d’Allemagne », qui tenait un salon littéraire fréquenté par la haute société de Berlin : le prince Louis-Ferdinand, Brentano, Marcus et Henriette Herz, Schiller, Heine, la famille Mendelssohn.... Un enfant naquit en 1802, Lodewijk (Louis).
Carel prit une part active au développement de « Felix Libertate » aux côtés de son père. En 1808, il fut nommé chef du cabinet au Ministère des Cultes, puis à la Cour des comptes, puis auditeur au Conseil d’état. En 1811, il fut nommé juge de Paix au premier canton d’Amsterdam, fonction à laquelle un Juif n’avait encore jamais accédé. En 1815, il entra au Ministère de la Justice dont il deviendra le secrétaire.
Il publia le Droit pénal et un essai comparatif des codes Civils français et hollandais.
Apprécié de tous, Carel ASSER n’a jamais été inquiété lors des changements de régime ou de pouvoir. Il fut décoré Chevalier de l’Ordre royal du Lion néerlandais en 1821. En 1828, il fut nommé président de la Commission principale des affaires israélites.
Tobias ASSER (1783 – 1847), le second fils de Mozes, a également étudié le droit à l’Athenaeum d’Amsterdam; diplômé maître de droit à Leyde, il prit la suite de son père. Comme son père et son frère, il fut nommé Chevalier de l’Ordre royal du Lion néerlandais. Tobias épousa Carolina Itzig (ou Isaac) fille du banquier de cour, lié plusieurs fois à la famille Mendelssohn. Leurs trois enfants furent élevés dans un milieu cultivé et aisé.
Il est intéressant de remarquer les relations de cette famille avec les Juifs de Berlin.. Comme les familles de cette ville auxquelles ils étaient liés, les ASSER faisaient partie des Juifs « éclairés » et assimilés. Les journaux tenus par les petits-enfants de Mozes ne reflètent pas d’atmosphère religieuse sauf lors des circoncisions, mariages et enterrements.
Tobias Michael Carel ASSER (1838-1913), petit-fils de Tobias, fut également un homme d’état et un juriste. En 1860, il fut délégué à la Commission pour la liberté de navigation sur le Rhin. Professeur de droit international et privé à l’Athanaeum d’Amsterdam, il contribua à la création du droit international. Il participa aux conférences pour la paix à La Haye en 1899 et 1907, fut arbitre dans de nombreux conflits internationaux, comme celui entre les USA et la Russie concernant le Détroit de Behring. Ces activités lui valurent de partager le prix Nobel de la Paix en 1911. Il joua également un rôle actif dans la communauté juive d’Amsterdam, avant de se convertir secrètement au protestantisme.
Carel ASSER (1843-1898), petit-fils de Carel, fut également juriste et professeur de droit à l’Université de Leyde.
Remerciements : à Henk ASSER, descendant des deux frères Carel et Tobias ASSER, à Helga BECKER-LEISER pour les traductions de nombreux documents, à son frère Robert ASSER, pour l’envoi du portarit, à David FRAMOWITZ, descendant de Eliazer NERDEN, au Musée Juif d’Amsterdam pour sa documentation sur les trois membres néerlandais du Grand Sanhédri. « Trouwen in Mokum » (mariages à Amsterdam), de D. Verdooner.- Autres sources : Encyclopedia Judaica, Memorbook de M.H. GANS.